Bien que plusieurs types de
désinfectants puissent être utilisés pour la désinfection du site d’injection,
la plupart des programmes d’échange distribuent des tampons alcool.
Réutilisation et partage
Les tampons alcool semblent
être moins partagés que d’autres outils de réduction des risques. 23% seulement
des personnes interrogées dans une étude écossaise ont déclaré avoir partagé
des tampons alcool (Scottish Drug Forum and Glasgow Involvement Group, 2004).
Type de désinfectant utilisé
Différents types de
désinfectants peuvent être utilisés; cependant si une alternative à l’alcool
est utilisée, c’est généralement une lingette à la Chlorhexidine. Voici les caractéristiques de ces deux
produits
Tableau 1: Activité antimicrobienne des
antiseptiques utilisés pour l’hygiène des mains, OMS (2007)
L’alcool est un excellent antiseptique, il est
simple de se le procurer, et il est peu onéreux (Mangram et al., 1999; Tietjen
et al., 2003). L’utilisation d’un tampon alcool sur le site d’injection avant
que celle-ci soit pratiquée est conseillée par l’Organisation Mondiale de la
Santé (OMS, 2010). Sa capacité de destruction rapide le rend très efficace pour
ce qui est de réduire le nombre de micro-organismes présents sur la peau.
L’alcool est efficace contre les bactéries Gram-positives et Gram-négatives et
sur un certain nombre de champignons. De plus l’alcool a également une activité
antivirale contre toutes les hépatites et le VIH (OMS 2006).
L’alcool fait partie des antiseptiques les plus
sûrs. Bien qu’il ne permette pas de les éliminer de manière permanente, la
rapide réduction des micro-organismes sur la peau protège contre leur
réapparition pendant plusieurs heures (OMS 2006, Tietjen et al., 2003).
Cependant, l’alcool est facilement rendu inopérant par les matières organiques
et ne doit donc pas être utilisé sur une peau non préalablement nettoyée (OMS,
2010).
La Chlorhexidine est également
un excellent antiseptique. Son activité anti microbienne immédiate est plus
faible que celle de l’alcool, mais son action dure plus longtemps (OMS, 2006).
Il est efficace contre les bactéries Gram-positives mais l’est moins contre les
bactéries Gram-négatives et les champignons (Tietjen et al., 2003). La Chlorhexidine
est également efficace contre le VIH (OMS, 2006). Les solutions ou les
lingettes de Chlorhexidine à base d’alcool sont plus efficaces que celles à
base d’eau (Lemani et al, 2009).
L’action de la Chlorhexidine
est très peu affectée par les matières organiques, mais le savon, les
substances contenues dans l’eau calcaire et certaines crèmes pour les mains
réduisent voire neutralisent son action (OMS, 2006; Tietjen et al. 2003).
L’alcool et la Chlorhexidine
sont cependant tous les deux inefficace contre les spores bactériennes.
Efficacité des tampons alcool
Dans une étude qui ne
concernait pas les injections intraveineuses et qui a été réalisée dans un
contexte hospitalier, il n’a pas pu être prouvé que la désinfection de la peau
réduisait les infections sur le site d’injection (SIEH, 2004). Les auteurs
recommandent simplement de nettoyer la zone à l’eau et au savon. Cependant,
comme nous le disions, cette étude ne concernait pas les injections
intraveineuses. De plus, l’hygiène environnementale dans un hôpital diffère
grandement de celle des endroits dans lesquels sont généralement pratiquées les
injections de stupéfiants, l’eau courante et le savon étant toujours
accessibles dans les hôpitaux.
De plus, dans une étude
présentée par Scott (2008) seule une personne de l’échantillon s’était lavé les
mains avant préparation, même si 83% des injections étudiées avaient été
préparées dans des bâtiments ayant probablement accès à l’eau.
Dans une étude de Vlahov et
al (1992), il a été démontré que les personnes qui nettoient toujours leur peau
souffraient moins d’abcès que les autres. Murphy et al (2001) ont eux montré
que la désinfection de la peau à l’alcool avant injection était le seul facteur
protecteur indépendant (risque relatif de 0,48). Biswanger et al. (2010) ont également trouvé
une différence, bien qu’elle ne soit pas statistiquement significative.
Contaminations virales dues à la réutilisation et au
partage des tampons alcool
Crofts et al. (1999) ont
trouvé de l’ARN du VHC sur 67% des tampons alcool testés. Thibault et al.
(2011) en ont eux aussi détecté (jusqu’à 80-83%), cependant on ne sait pas s’il
s’agit de tampons secs post injection ou de tampons alcool.
De plus, Thibaut et al.
(2001) expliquent que les tampons alcool étaient parfois contaminés par du
sang. Cela montre une que les tampons étaient utilisés de manière inappropriée,
sachant qu’ils sont supposés être utilisé avant injection et non après.
Ces études ont détecté de
l’ARN viral, mais elles ne disent pas clairement si le virus était toujours
infectieux. L’alcool a des propriétés virucides, et des recherches
additionnelles devraient être menées pour déterminer si la charge virale est
suffisamment haute pour causer des infections.
Autres infections et risques généraux lies avec
l’utilisation, la réutilisation et le partage des tampons alcool
Les tampons alcool sont
parfois utilisés pour nettoyer les mains et les doigts, et même certaines
surfaces. Bien qu’il soit efficaces sur la peau, l’alcool n’est pas le meilleur
désinfectant pour nettoyer des surfaces ou des outils de réduction des risques
(l’eau de javel est par exemple plus efficace). De plus, les tampons alcool
sont conçus pour désinfecter une petite zone de la peau seulement. Il faut donc
veiller à ne pas réutiliser le tampon pour désinfecter plusieurs parties du
corps car il existe un risque d’auto
-contamination
lié au déplacement des bactéries sur le point d’injection.
Recommandations
Conseiller aux usagers de
se laver les mains avant l’injection. Les mains peuvent être nettoyées à l’eau
et au savon, avec un gel hydro-alcoolique ou des lingettes.
Le site d’injection doit
être ensuite désinfecté avec un tampon alcool
Des tampons séparés doivent
être utilisés pour la désinfection de plusieurs parties du corps, ou pour
nettoyer de plus larges surfaces de peau.
Les tampons alcool doivent être
utilisés pour désinfecter le site d’injection uniquement. On désinfecte une
petite surface en frottant le tampon sur le site d’injection une seule fois et
dans une seule direction pour éviter d’y amener des bactéries présentes sur d’autres
endroits de la peau. Ensuite, il faut laisser la peau sécher naturellement
avant de pratiquer l’injection.
Un petit tampon alcool est
suffisant. Si certains programmes de réduction des risques souhaitent en
distribuer de plus larges, ils doivent informer leurs usagers en leur
expliquant qu’ils ne doivent pas être utilisés à la fois pour laver les mains, le
bras et le site d’injection.
Références
Binswanger, IA,Kral, AH,Bluthenthal, RN,Rybold, DJ,Edlin, BR (2000)High Prevalence of Abscesses and
Cellulitis Among Community-Recruited Injection Drug Users in San FranciscoClin Infect Dis.30(3):579-581
Mangram AJ,
Horan TC, Pearson ML; Silver LC, Jarvis WR (1999) Guideline for Prevention of
Surgical Site Infection, 1999 Infection Control and Hospital Epidemiology. 20
(4): 250-280
Murphy EL,
DeVita D, Liu H, Vittinghoff E, Leung P, Ciccarone DH, Edlin BR.(2001) Risk
Factors for Skin and Soft-Tissue Abscesses among Injection Drug Users: A
Case-Control StudyClin Infect
Dis. (2001) 33 (1): 35-40
Vlahov D, Sullivan M, Astemborski J, Nelson KE (1992)Bacterial Infections and Skin Cleaning
Prior to Injection Among Intravenous Drug Users. Public Health Rep107(5):595-598
WHO (2006). WHO Guidelines on hand hygiene in Health Care. (Advanced Draft)
WHO (2009) WHO Guidelines on Hand Hygiene in Health Care : a Summary.
WHO (2010)WHO best practices for injections and related
procedures toolkit.ISBN 978 92 4 159925 2